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Comment ces femmes allemandes ont adhéré au système totalitaire nazi

Des femmes au service du troisième Reich.

Pour prendre le pouvoir de manière totalitaire, il faut organiser la conquête en deux temps : utiliser la propagande pour créer un monde mensonger et pseudo-cohérent selon l’idéologie, puis établir une terreur qui impose l’idéologie. »
(Le débat interdit : langage, covid et Totalitarisme) Ariane Bilheran et Vincent Pavan )

Document inédit sur Arte projeté le 31 janvier 2023 « des femmes au service du troisième Reich ». L’intérêt de ce document vient de ce qu’il décrit, de façon approfondie, comment (ici des femmes allemandes) ont adhéré au système totalitaire nazi.

Si nous insistons sur le caractère totalitaire de cette période historique, c’est parce qu’on peut retrouver dans ce document, à travers l’engagement d’individus, tel qu’il nous est présenté et décrit, tous les ressorts qui poussent hommes et femmes à embrasser une cause éminemment destructrice, par leur adhésion volontaire à un système qui décide qui doit vivre, mourir et comment.

Ces êtres renoncent à leur liberté fondamentale de choisir entre le Bien et le Mal. La mise en place diabolique d’un système manipulateur, fait d’eux, les exécutants consentants d’un crime contre l’humanité. D’ores et déjà on peut dire que les totalitarismes se ressemblent même s’ils présentent des modes d’action qui les distinguent les uns des autres, selon les pays et leur histoire propre.

De même que les gardes rouges ont adhéré à la révolution maoïste, les jeunesses hitlériennes et une partie massive de la population ont soutenu le National-Socialisme, pour des raisons personnelles, certes, mais principalement grâce à un mouvement de masse savamment créé, manipulé par Hitler et sa clique de la propagande.

La propagande, fer de lance de l’embrigadement.

La propagande, par sa mise en scène hystérique, est parfaitement structurée. Chaque individu fait corps avec la masse, ce qui lui donne un sentiment d’appartenance à un peuple, de puissance mais aussi de ferveur partagée et d’engagement collectif. On retrouve, comme en Chine ou en URSS, les mises en scène où le peuple est appelé à communier avec la même ardeur dans un projet de société qui le dépasse et l’agrège à la masse, lui donne le sentiment que chacun fait corps dans un même destin, avec au bout, un horizon radieux.

Cela est lisible, entre autres, dans les lettres écrites par certaines jeunes filles embrigadées dans les Jeunesses hitlériennes, heureuses de sortir du cocon familial. L’une d’elles écrit :

« Je brûlais d’envie de me jeter dans cette mer, de m’y perdre et d’être portée par elle. »

Une autre dit : « Il me faisait sortir (l’engament dans les JH) de ma vie étroite et étriquée de ma vie d’enfant, pour m’attacher à ce qui était grand et essentiel. »

Une étude psychanalytique nous serait utile pour expliquer ces confessions !

Dans le commentaire du document, nous apprenons que les jeunes trouvent dans la propagande une incitation à vivre pour un idéal : celui de servir le Parti et la Nation, tout comme les Chinois ou les soviétiques étaient appelés à « servir le peuple et la révolution ». Dans l’Allemagne nazie, les jeunes ne sont pas « obligés » mais ils sont incités à entrer dans les Jeunesses hitlériennes parce que l’offre est alléchante et présente des bénéfices non négligeables.

C’est le culte de la nature et du corps sain, très en vogue à cette époque, pour une société hygiéniste et bientôt eugéniste. On organise pour eux, des activités sportives, marche, natation, équitation, des randonnées et une vie collective au grand air. Tout cela est gratuit pour ceux qui s’inscrivent aux « jeunesses hitlériennes » et l’on comprend que pour cette jeunesse, venant souvent de couches sociales pauvres, cette prise en charge est une aubaine. On sort de la famille, on s’émancipe. L’une des participantes explique :

« Je voulais faire partie de ce que je voyais » : (une Allemagne en plein bouleversement). Une autre, venant d’une famille bourgeoise aisée, écrira dans ses Mémoires :

« Ma vie me paraissait vaine. Je me sentais soudain comme un demi-dieu dans ce pays. »

Les moyens de l’embrigadement sont simples : un chef, un Parti, un discours accessible à tous, et tout l’attirail qui met en scène le culte de la personnalité, de façon grandiose : les grands meetings où une immense foule est galvanisée et subjuguée par les discours du Führer. Une organisation théâtrale, impeccable par son ordonnance et sa discipline. Des drapeaux et oriflammes par milliers, des bannières qui répètent à l’infini la croix gammée, symbole du nazisme, et les discours fleuves de Hitler qui, paraît-il, avaient un effet subjuguant, notamment sur les femmes.

Le nombre, la cohésion d’un peuple uni derrière son chef, tout cet appareil parfaitement huilé, nouveau, instillait la ferveur ou plutôt la foi, la force, et balayait la défaite et l’humiliation de 1918. Le peuple allemand communiait dans un projet de société qui lui redonnait sa grandeur perdue. Il était sous l’emprise d’un fanatisme savamment entretenu par la propagande, d’autant qu’un bouc-émissaire : le Juif, était tout désigné et justifiait, par son existence même, sa mise ban de la société avant sa destruction.

« Des femmes ordinaires qui se retrouvent dans une situation extraordinaire ».
La politique raciale

On le sait, la jeunesse est facilement manipulable, surtout quand elle n’est pas satisfaite de la vie familiale ou craint un avenir sans perspective et sans exaltation. C’est pourquoi les tyrans ont toujours cherché à l’endoctriner. Cependant, cette révolution nazie, ne va pas jusqu’à proclamer l’égalité entre les hommes et les femmes. Celles-ci, ont le mépris d’Hitler et sont soumises à un régime discriminatoire.

Leur rôle est la procréation, (voir les lebensborn [1]) l’élevage des enfants et la tenue du ménage. Si elles veulent épouser un homme appartenant au parti nazi, elles doivent subir les tests provenant de la politique raciale : elles sont mesurées sur toutes les coutures, pour confirmer leur aryanité et répondre aux critères de race pure, de santé physique et mentale. Elles doivent être de pures aryennes.

Dans ce documentaire, une jeune fille veut épouser un officier nazi. (Sans doute sait-elle que cela lui sera utile dans son désir d’ascension sociale). Elle mettra trois ans avant d’avoir l’agrément des autorités nazies. Elle passera des tests raciaux, devra rendre compte d’une généalogie impeccable, et devra renoncer au catholicisme puisqu’elle a été baptisée et a suivi un enseignement religieux, sa famille étant catholique. Ses parents en seront meurtris[2]. pouser un nazi, c’est faire carrière et s’élever dans la société : une revanche pour les femmes d’un niveau social inférieur, pauvre et sans avenir.

C’est pourquoi, les jeunes femmes, engagées dans les jeunesses hitlériennes, vont être appelées à servir la patrie, et à se compromettre dans des actions criminelles qu’elles ne pourront refuser qu’à la condition de renoncer à l’avenir qu’elles espèrent. Mais comment renonceraient-elles à ce qu’elles pensent être l’occasion de réussir ou tout simplement parce qu’elles sont victimes d’un énorme mensonge ?

Celles qui occupent des postes dans la santé : soignantes, infirmières ou plus rarement médecins, sont appelées naturellement à agir selon la volonté du parti. Elles participeront à l’élimination des handicapés et malades mentaux et cela avant la guerre. Cette élimination par le gaz servira d’exemple, en avant-première, aux crimes de masses perpétrés sur les Juifs et les populations considérées comme inférieures. Ce sera le premier génocide du troisième Reich. Une fois qu’on a mis le pied dans le système, on est prisonnier de celui-ci et l’on obéit aux ordres sans réfléchir, car on est convaincu d’agir pour le Bien. Et plus on a d’ambition, plus le système apparaît comme le moyen de s’élever dans la société totalitaire. L’étude des individualités montre que chacune des femmes engagées, cherche une marche qui la propulsera en haut de l’échelle sociale. Cela peut se résumer ainsi :

  • – Sortir de son milieu social médiocre, voire inférieur.
  • – Entrer au Parti.
  • -Faire un beau mariage avec un SS (changer de condition).
  • – Avoir du pouvoir sur les autres, donc sortir de sa condition d’infériorité en abusant de son pouvoir.

Nous avons là tous les ingrédients de la propagande, pour construire un monde meilleur, débarrassé des nuisibles : malades mentaux, Juifs et autres sous-hommes. Un monde où sont exaltés la collectivité et l’obéissance aveugle au chef, un monde structuré, hiérarchisé, où chacun devient un rouage du destin collectif.

On crée une nouvelle religion dont Hitler est le Dieu. Cela se passe de la même façon dans toutes les sociétés totalitaires,

Servir la cause du Führer et de son parti nazi, comme servir la cause du peuple ou celle de Staline et de Mao : moyen pour les hommes et les femmes, d’élever leur condition et d’en recueillir les bienfaits de toutes sortes : prestige, postes de responsabilité, argent, honneurs…


C’est pourquoi la plupart des jeunes femmes des jeunesses hitlériennes s’engagent et trouvent là une opportunité pour accéder à des postes où elles auront des responsabilités et un statut.

Il faut noter que dans ce document filmé, seule une jeune femme (qui deviendra une des rares juristes femme, à cause du numérus clausus), sortira de cet engrenage pervers. L’Université est destinée aux hommes ; les femmes ne pouvant, en général, suivre les cours de droit ou de médecine. Cette jeune femme comprend très vite la nature du travail qui lui est demandé. Elle écrit un journal et prend des photos qui seront un précieux témoignage après la chute du troisième Reich.

Une fois la guerre déclenchée par Hitler, avec l’invasion de la Pologne, les hommes étant partis, les femmes vont, elles aussi, être missionnées pour occuper des postes dans les pays conquis. C’est le moment de la construction massive des ghettos, des camps d’internement et d’extermination. (Les premiers camps construits en Allemagne étaient destinés aux opposants au régime et aux asociaux). Des femmes y sont envoyées soit parce qu’elles suivent leurs époux SS, soit parce qu’elles occuperont des postes de garde-chiourmes dans les camps.

C’est dans ces camps qu’elles vont révéler la bestialité, la cruauté dont se souviennent les détenues qui ont survécu. Des récits de rescapés, des films[3] en témoignent. Grâce aux archives, on peut voir notamment, une scène horrible (à Ravensbrück), ou une femme de SS, aidée par son mari pour s’exercer au tir, prendre plaisir à tirer sur des enfants qui travaillent en face de sa maison. Six coups de feu, six jeunes vies assassinées. Elle sourit, fière de cette performance.

Les gardiennes frappent les détenues. Elles portent la haine sur leur visage. Ces femmes ne leur ont rien fait mais elles sont simplement à leur merci et les gardiennes peuvent cogner à satiété. Cette haine, cette violence, cette pulsion meurtrière sont celles de femmes que l’on croit douces par nature…

Le tabou de la femme violente

D’entrée de jeu, les historiennes qui présentent ce document s’étonnent de découvrir la violence féminine, surtout concernant des crimes contre l’humanité. Cela peut paraître surprenant car nous ne manquons pas d’exemples d’infanticides, de brutalités physiques ou psychologiques, imposées à des enfants par leurs mères, notamment, ou à leurs conjoints. La littérature et le cinéma sont remplis d’exemples de femmes méchantes, violentes, tyranniques, voire meurtrières. Ne serait-ce donc pas un préjugé inégalitaire que l’histoire rectifie ?

Comme les hommes, les femmes peuvent être avides de pouvoir – et ce n’est pas la vie politique actuelle qui nous démentira ! Elles peuvent être capables de coups bas pour parvenir à leurs fins. L’Histoire nous montre aussi que, bien souvent, des femmes proches d’hommes puissants ont orienté leur politique en leur soufflant des stratégies qu’elles ne pouvaient mettre en œuvre elles-mêmes. Pour le nazisme, c’est la même chose, mais la monstruosité des crimes commis nous révulse dès lors qu’on constate que des femmes ont pu y participer activement, avec sadisme.

Cela nous oblige à nous rappeler que le Mal existe et qu’il est d’autant plus prégnant que l’homme se croit tout puissant. Le judaïsme et le christianisme nous rappellent que l’homme qui ne s’autorise que de lui-même est un danger pour lui et pour les autres. Les textes sacrés nous enseignent que nous sommes libres de choisir entre le Bien et le Mal. En cette époque de déraison où la nature humaine est bafouée, où l’homme et la femme sont interchangeables et dénaturés, ou chacun est appelé à jouir sans entraves, où le consumérisme est roi, où les valeurs civilisationnelles sont bafouées et appelées à disparaître, l’homme est nu dans un monde technologique qui grignote son temps et sa vie chaque jour davantage.

Le « plus jamais ça », scandé comme un mantra, à propos de la Shoah est vain car nos sociétés n’ont pas appris grand-chose des systèmes totalitaires.

Or le totalitarisme peut prendre différents visages. Nous pensions nos sociétés « démocratiques » à l’abri du totalitarisme. Pourtant, nous commençons à percevoir qu’il peut muter et, sous couvert d’un capitalisme financier entre les mains d’apprentis sorciers, ivres de leur pouvoir, il peut imposer un contrôle toujours plus prégnant sur les populations, tel qu’il existe déjà en Chine avec « le crédit social »[4].

Klaus Schwab semble admirer la façon dont Xi Jin ping « tient » la population sous sa férule car « l’Empereur rouge » se veut le continuateur de Mao. Mais cela ne l’empêche nullement d’encourager et contrôler, via le Parti communiste, un capitalisme sauvage, aux mains d’une oligarchie proche du Parti communiste.

Les milliardaires du Forum de Davos ont pour la Chine les yeux de Chimène. Ils veulent instaurer un nouvel ordre mondial et l’on en voit déjà les effets dévastateurs : disparition des nations, accueil suicidaire des populations essentiellement musulmanes qui n’ont aucune intention de rompre avec leur mode de vie et qui remplaceront les populations de souche par le nombre. Crise majeure de la culture qui, via l’Éducation nationale, ne transmet plus les connaissances mais fait de « l’agitprop » et instille, chez les jeunes, l’idéologie wokiste.


Cette destruction programmée de notre société n’est pas sans rappeler, dans sa phase actuelle, une violence intolérable qui nous fut imposée par un confinement absurde pendant deux ans, au prétexte du Covid. On peut se demander s’il ne s’agit pas des signes avant-coureurs d’une société totalitaire à venir. De plus, des technologies débridées nous mènent vers un transhumanisme d’où l’éthique semble absente.

Comme les virus, le totalitarisme peut muter. N’oublions pas que l’homme ne manque pas d’imagination, surtout quand le goût du pouvoir est sans borne. Nous n’en avons pas fini avec lui ! Et ce document, qui rapporte des faits vieux de quatre-vingt-dix ans, (accession de Hitler au pouvoir) doit nous faire réfléchir sur notre présent et sur l’avenir que nous voulons pour les jeunes générations. Mal connaître l’Histoire, c’est s’exposer à répéter les mêmes erreurs.

J’ajoute que beaucoup voient encore dans le nazisme un « fascisme » et non un totalitarisme. Ce n’est pas un hasard. Quand on observe les points communs entre l’URSS, la Chine de Mao[5] (pour ne citer que ceux-là) et le troisième Reich, je le répète, on constate que les ressemblances sont bien plus nombreuses que les différences. Les structures fondamentales sont identiques. La différence consiste dans la mort industrielle, inédite, infligée aux Juifs et aux Tziganes par les nazis. Ce moyen mis au point par les nazis correspondait à l’avancement technologique de l’Allemagne, pays déjà industrialisé. Le goulag ou le laogaï[6] étaient plus « rustiques » mais l’intention était la même et le nombre de morts fut considérable.

©Evelyne Tschirhart

Texte publié dans Mabatim le 04/02/2023

  • [1] Les lebensnborn : source de vie en vieil allemand – donner naissance à des enfants parfaits.
  • [2] Il est important de rappeler que l’église avait pour vocation de disparaître sous le troisième Reich ! Ses principes moraux, et la transcendance christique, ne s’accordaient pas avec la toute-puissance du système nazi qui ne s’autorisait que de lui-même.
  • [3] Voir le film « La passagère » de Munk.
  • [4] Le crédit social : système de contrôle de la population chinoise.
  • [5] Voir mon dernier livre : « Quand « le soleil rouge » les aveuglait » éditions Balland décembre 2022.
  • [6] Laogaï : camps de rééducation chinois.

Dreuz.info


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