Jérusalem au XIXe siècle – 4ème partie et fin
L’essor de la Jérusalem juive à l’époque de la «Première Aliyah»
On a coutume d’estimer à 11.000 le nombre de Juifs habitant à Jérusalem en 1870, et ce, sur une population globale de 22.000 habitants, dont 6000 musulmans et 5000 chrétiens.
La communauté s’accroît considérablement dans les années qui suivent.
Elle compte 18.000 individus en 1880, 25.000 en 1890 et 35.000 en 1900. Elle atteint le chiffre de 45.000 à la veille de la Première Guerre mondiale sur un total de 70.000 habitants (12.000 musulmans et 13.000 chrétiens).
Cet accroissement de la population juive est dû en premier lieu à l’intense aspiration vers la Ville Eternelle.
A partir des années 1840, nous pouvons en effet constater l’existence d’un mouvement d’immigration pour des raisons religieuses, qui se poursuit pendant la période de la Première Aliyah.
On estime qu’autour de 1890, les différentes colonies ne comptaient pas plus de 3000 personnes, et en 1900, juste avant le début de la Deuxième Aliyah, la population des colonies ne dépassait pas 4500 individus.
Pendant ce temps, l’accroissement de la population de Jérusalem est beaucoup plus important car, pendant toute la période de la Première Aliyah, nombreux sont les Juifs qui continuent à venir s’installer à Jérusalem.
L’arrivée de ces immigrants est une des raisons de l’accroissement de la population juive de la ville, mais ce n’est pas la seule.
Vers la fin du dix-neuvième siècle le taux de natalité est très élevé.
Ce phénomène a toujours caractérisé le Vieux Yishouv, mais avec l’amélioration des conditions de vie et la baisse de la mortalité, particulièrement de la mortalité infantile, ainsi que la disparition des épidémies et de nombreuses maladies, la population s’accroît considérablement.
Ce qui va entraîner une reprise dans la construction des quartiers hors des murs.
La deuxième phase de construction commence dans les années 1882-1883, quand le Sir Moses Montefiore Memorial Fund contribue au financement des sociétés construisant les quartiers de «Mazkeret Moshé» et «Ohel Moshé» qui portent le nom de leur bienfaiteur et qui ont à peu près conservé leur forme d’origine.
Cependant, le phénomène le plus marquant de cette deuxième phase de construction est l’apparition de sociétés d’entrepreneurs en bâtiment.
Au cours de la deuxième moitié des années 1880, apparaissent un certain nombre de compagnies commerciales spécialisées dans la construction d’appartements, qu’elles vendent ou louent à des particuliers.
La plus active de ces compagnies est celle de Frutiger, un protestant allemand envoyé par la mission de Bâle pour établir une banque à Jérusalem. Frutiger a pris comme associé son employé le Juif Yosef Navon, qui allait par la suite recevoir le titre de «Bey».
Ils s’associent à Shalom Kanstrom Blecher, un Juif, ferblantier de son état, et fondent ensemble une entreprise de construction.
Les quartiers les plus connus construits par cette compagnie sont Soukkat Shalom (du nom de Shalom Kanstrom) et Ir Shalom (les bâtiments Perlman). Il y a eu un autre quartier, «Beit Yosef», construit dans une zone plus éloignée et dont nous ignorons l’emplacement exact, du côté de l’actuel Abu-Tor. Mais comme ce quartier était éloigné des centres de la vie communautaire juive, les Juifs n’ont pas voulu s’y installer et ces appartements ont finalement été vendus ou loués à des non-juifs.
La deuxième phase de construction des quartiers hors des murs s’achève en 1890, l’année de la seconde vague de la Première Aliyah – l’Aliyah Tiomkin, constituée de réfugiés de Russie qui vont donner un nouvel essor au développement du Yishouv dans tout le pays.
La fondation de Hedera et de Rehovot est liée à cette vague d’aliyah de 1890.
En 1888-1889, des habitants pauvres de Jérusalem sortent de la Vieille Ville pour fonder le premier quartier «Khap» d’Eretz-Israël.
«Khap» est un mot yiddish qui signifie prendre, attraper, chiper. En d’autres termes, il s’agit de personnes qui s’installent illégalement sur un terrain et y construisent leurs maisons sans autorisation.
C’est précisément ce qui est arrivé à Kerem Moshé vi-Yehoudit, sur le vaste terrain qu’avait acquis Moses Montefiore et sur lequel on avait construit le quartier de Mishkenot Shaananim, qui ne comprenait que vingt-six maisons.
Une grande partie du site étant demeurée vide, des Juifs pauvres de la Vieille Ville ont estimé qu’ils pouvaient construire sur ce terrain inoccupé des maisonnettes, baraques et autres bicoques.
L’endroit s’est rapidement transformé en une sorte de bidonville habité par une population pauvre qui avait quitté la Vielle Ville et cherchait à s’établir hors des murs.
Le Sir Moses Montefiore Fund en Angleterre a reçu des plaintes selon lesquelles cette construction sauvage du «Khap» enlaidissait le paysage de la ville. Il a donc été décidé que ces habitants illégaux seraient évacués et que l’on construirait sur le terrain ainsi libéré un grand quartier où une partie des familles évacuées serait relogée par la suite. Ce qui fut fait.
Les habitants du quartier «Khap» ont effectivement été évacués et, avec l’aide des comités des communautés sépharade et ashkénaze, on a construit des quartiers pour les reloger.
Le quartier des Sépharades se nomme Shevet Zedek, ou le Quartier des Maisons de Tôle, tout près de Mahané Yehoudah.
En face de Sha’arei Moshé (les bâtiments Wittenberg), on a construit le quartier ashkénaze Bnei Moshé. Sur le site de Kerem Moshé vi-Yehudit, on a construit le vaste quartier de Yemine Moshé, composé de soixante-cinq maisons pour Sépharades et un nombre égal pour Ashkénazes.
On a également construit des fours à pain séparés pour Ashkénazes et Sépharades. (Des abattoirs séparés pour Ashkénazes et Sépharades existaient déjà dans la ville.)
Soit dit en passant, on a parfois tendance à confondre Mishkenot Sha’ananim et Yemine Moshé. Mishkenot Sha’ananim était un quartier de Batei Hekdesh, des habitations construites en 1860, par Moses Montefiore, en même temps que le moulin à vent, alors que Yemine Moshé est un quartier bâti trente ans plus tard.
Une des preuves les plus éclatantes de la préférence donnée au développement hors des murs est la construction de l’un des quartiers les plus connus, «Batei Ungarn» du kolel hongrois, l’un des kolelim les plus importants de la ville.
Nombreux étaient ceux qui, au début, réprouvaient l’idée de sortir hors des murs et avançaient l’argument que Jérusalem est ce qui est à l’intérieur des murs. Autrement dit, les quartiers hors des murs n’étaient pas Jérusalem.
Il y avait par exemple la question de la date de célébration de la fête de Pourim, car cette fête est célébrée à Jérusalem avec un jour de retard par rapport aux autres villes. Cela signifiait par conséquent que ceux qui habitaient hors des murs devaient célébrer la fête de Pourim comme à Jaffa.
D’autres considéraient qu’ils étaient venus vivre à Jérusalem tout près du Mur des Lamentations, dans la Vieille Ville, dans le Quartier juif, et non dans la Nouvelle Ville.
Certains des habitants de la Vieille Ville s’obstinaient à refuser de sortir hors des murs.
Dans son livre La Voie d’un juge à Jérusalem, le juge Gad Frumkin, fils de Y. D. Frumkin – propriétaire du journal ha-Havatzelet – nous rapporte d’intéressantes descriptions de la manière dont son père refusait de quitter la Vieille Ville, car, prétendait-il, c’est là qu’il il fallait absolument rester. Mais Madame Frumkin insistait pour déménager vers la Ville Nouvelle, car la Vieille Ville devenait dangereuse et les conditions de vie y étaient difficiles. Elle n’est parvenue à persuader son mari qu’au début du vingtième siècle, après qu’elle eut été attaquée par des brigands en rentrant chez elle de nuit, et eut craint pour sa vie.
En 1890, le kolel hongrois finit par céder lui aussi et, en 1891, commence la construction hors des murs des «Batei Ungarn», qui allaient devenir un des quartiers les plus importants. D’autres kolelim suivent l’exemple et construisent également hors des murs, le kolel de Varsovie, le kolel de Horodenko, le kolel de Vilna et le kolel de Wohlin.
Les kolelim étaient des institutions importantes et jouaient un rôle de tout premier ordre dans l’organisation de la vie communautaire juive de la Vieille Ville dans la mesure où ils contrôlaient les fonds de la halukah.
Ils comprennent que pour aider les membres de leurs communautés, ils doivent leur construire des logements hors des murs.
Une autre évolution se manifeste dans les années 1890, lorsque la communauté des Juifs de Boukhara, l’une des plus riches de la ville, entreprend la construction de son propre quartier.
Les membres de cette communauté, qui sont arrivés à Jérusalem dans le courant de dix-neuvième siècle, avaient beaucoup d’argent et ont construit le quartier le mieux planifié, le plus vaste et le plus beau de la Jérusalem de l’époque.
En conclusion, nous pouvons distinguer cinq catégories de quartiers.
Le premier est le «Hekdesh», comme le premier quartier construit par Montefiore, Mishkenot Sha’ananim, le «Bet Hekdesh» de David Reiz Yanover, et quelques autres. Un important quartier de ce type est Sha’arei Moshé (les bâtiments Wittenberg) près de la rue Strauss, et qui existe encore.
Ces quartiers de «Hekdesh» ont été construits par des philanthropes, pour des lettrés qui y vivraient deux ou trois ans et parfois même pour toute leur vie. En retour, le bienfaiteur demandait aux résidents de prier à sa mémoire le jour anniversaire de sa mort. Le règlement limitait parfois la résidence aux membres d’un kolel particulier ou d’une communauté particulière. Chaque type de Bet Hekdesh avait son propre règlement.
Un deuxième type de quartier était celui des «associations», un groupe de familles s’unissant pour construire un quartier en commun. C’est le cas de Nahalat Shivah, Me’ah Shearim, Even Israël, Mishkenot Israël et d’autres encore.
Une troisième catégorie est celle des entrepreneurs, comme Mahané Yehoudah. Ces quartiers sont parfois désignés par le terme de «quartiers de compagnies commerciales».
La quatrième catégorie est celle des kolelim qui, avec l’aide de philanthropes construisaient leur propre quartier. C’est pourquoi il y a souvent des Batei Hekdesh dans ces quartiers-là.
La cinquième catégorie est celle des quartiers «ethniques», comme le quartier Ada. Ce sont en général des quartiers des communautés orientales.
L’implantation des Yéménites.
On parle beaucoup de la Première Aliyah, des «Biluim» et des «Hovevei Zion» [Amants de Sion], ainsi que de la Deuxième Aliyah.
On oublie cependant de dire que les premiers Yéménites sont arrivés à Jérusalem l’année de la Première Aliyah et qu’ils ont construit leurs premiers quartiers à partir des années 1880.
Quand commence la deuxième étape de la construction hors des murs, les Yéménites construisent Kfar Shiloah à Silwan, et des douzaines de familles s’y installent. Ils se sont maintenus en cet endroit jusqu’à ce qu’ils soient obligés de quitter leurs maisons lors des émeutes de 1936-1939.
Une partie des maisons de ce quartier existe encore dans le village arabe de Silwan.
Les Yéménites ont également bâti un certain nombre de logements près du quartier de Mishkenot Israël. C’était le quartier «Mishkenot Teimanim» qui ne comportait pas plus de treize maisons – qui existent encore – parmi lesquelles la synagogue «ha-Goral» [le Destin] qui est une synagogue yéménite extrêmement intéressante.
Un autre quartier yéménite, «Nahalat Zvi», s’est bâti près de «Me’ah Shearim», et des Yéménites qui se sont également installés dans les différents quartiers de la ville.
Les Géorgiens sont arrivés à Jérusalem dans les années 1860 et 1870, avant la Première Aliyah.
Ils ont construit une synagogue géorgienne dans la rue Haggaï, dans la Vieille Ville, ainsi qu’un quartier géorgien hors des murs.
Les premiers Juifs persans sont également arrivés à Jérusalem dans les années 1860 et 1870 et ont construit plusieurs quartiers, essentiellement autour de Mahané Yehoudah.
Plus tard, arrivent des Juifs syriens, membres des riches communautés d’Alep et de Damas.
La synagogue Adass, appartenant à l’une des plus célèbres familles d’Alep, existe encore dans le quartier de Nahalat Tsion.
N’oublions pas de mentionner la contribution des Kurdes, qui ont également fondé un quartier, le «Sha’ar Rahamim» et des Ourphalis, qui se sont installés près de Nahalat Tsion dans les «Ohalim» (les tentes).
On peut donc dire que la contribution des communautés orientales au développement de Jérusalem est importante et fortement significative.
Il y a donc eu deux secteurs importants qui ont participé au développement de la ville hors des murs.
D’une part le «Vieux Yishouv», les Juifs qui résidaient dans la Vieille Ville et l’ont quittée pour construire la Nouvelle.
Et d’autre part les communautés orientales, qui ont largement contribué à la construction des quartiers hors des murs.
D’une manière générale, et sauf de rares exceptions, comme le quartier des Boukhariens, tous les quartiers ainsi construits par les uns ou les autres, sont des quartiers pauvres. Ce sont cependant ces quartiers qui ont posé les fondations de la Jérusalem nouvelle, et leur influence sur le caractère de la ville se fait encore sentir de nos jours.
La crise à la fin du dix-neuvième siècle et la suite du développement de la Jérusalem juive à l’époque de la Deuxième Aliyah.
Une grave crise économique éclate à Jérusalem dans les années 1890, contraignant plusieurs banques à la faillite, car, à cette époque, en effet, le gouvernement ottoman interdit aux Juifs d’acheter des terres en Eretz-Israël.
C’est le cas de la Banque Frutiger, dont les problèmes de liquidités sont dus au fait qu’ayant acquis de nombreux terrains, elle se retrouvait dans l’impossibilité de les revendre à leur juste valeur.
Auparavant, et pour des raisons analogues, la banque Gergheim – appartenant à un Juif converti au protestantisme – avait également fait faillite.
L’essor économique marque donc un temps d’arrêt vers la fin des années 1890, avec un ralentissement notoire dans l’activité des sociétés d’entrepreneurs en bâtiment, qui cessent presque tout à fait. Cette période marque la fin de la troisième étape dans la construction des quartiers hors des murs.
Luncz, qui est l’un des plus importants spécialistes de Jérusalem, et qui a publié une longue série d’ouvrages et de tableaux sur Jérusalem et sur Eretz-Israël, constituant une précieuse source d’information pour l’étude de la ville, effectue en 1897 un recensement des quartiers hors des murs. Il nous fournit une description détaillée de tous les quartiers bâtis jusqu’en 1897 – il en compte 46 – et nous donne le nombre d’appartements que comporte chacun d’eux.
Nous pouvons donc dire que la fin des années 1890, et particulièrement les deux événements importants qui ont lieu à cette époque – la visite du Kaiser Guillaume et celle, liée à la précédente, de Theodor Herzl, marquent la fin de la troisième étape dans le développement de la ville.
La quatrième étape débute avec le vingtième siècle et se poursuit jusqu’à la Première Guerre Mondiale.
Les différents quartiers continuent à se développer, il s’en construit de nouveaux, mais on note cependant un ralentissement dans le développement de la ville.
Autrement dit, la période du plus grand essor de Jérusalem est celle de la Première Aliyah.
Pendant la Deuxième Aliyah, à partir de 1904, la ville continue certes à se développer, mais à un rythme moins rapide que celui du reste du Yishouv juif dans le pays.
En 1900, Jérusalem compte 35.000 habitants Juifs, et il y en aura 45.000 à la veille de la Première Guerre mondiale.
Pendant le même temps, le nombre de Juifs habitant Jaffa passe de 3.000 en 1900 à 10.000 en 1914.
Cela signifie qu’à l’époque de la Deuxième Aliyah, la population juive de Jaffa s’est accrue proportionnellement davantage que celle de Jérusalem.
Il en va de même pour les différentes colonies qui, de 4.500 Juifs qu’elles comptaient en 1900, passent à un total de 12.000 en 1914.
Le développement des colonies est donc, pendant cette période, proportionnellement plus rapide que celui de Jérusalem, où la situation est relativement stagnante.
Dans les chapitres précédents, nous avons insisté sur le fait que le Yishouv juif de Jérusalem vivait sur les fonds de la halukah, c’est-à-dire des dons en provenance des Juifs de l’étranger.
Ce mode de vie avait un fondement idéologique: il s’agissait de Juifs qui venaient du monde entier pour vivre et étudier à Jérusalem, dans la Vieille Ville. Ils acceptaient de mener une vie difficile, dans des conditions d’habitation et de santé exécrables, alors que les endroits qu’ils avaient quittés leur proposaient une vie infiniment plus aisée. Ceux qui se dévouaient et faisaient un tel sacrifice, méritaient que leurs frères demeurés dans la diaspora leur viennent en aide.
Cependant, dans le courant de la deuxième moitié du dix-neuvième siècle, le nombre des habitants juifs de Jérusalem qui, ne se consacrant plus uniquement à l’étude de la Thora, se lancent dans diverses activités professionnelles augmente considérablement.
Une idéologie nouvelle émerge, exigeant des lettrés une certaine productivité et un minimum d’indépendance économique.
Certains d’entre eux deviennent alors menuisiers, tailleurs, coiffeurs, cordonniers, ferblantiers. D’autres travaillent le cuivre et l’argent. D’autres encore pénètrent dans les professions du souk de la Vieille Ville. Vers la fin du dix-neuvième siècle, une grande partie des boutiques de la rue David, la rue des chrétiens et d’autres rues de la Vieille Ville, appartenaient à des Juifs.
Les premiers journaux en hébreu, ha-Levanon et ha-Havatzelet, commencent à paraître en 1860 et, à la veille de la Première Guerre Mondiale, onze imprimeries hébraïques fonctionnent à Jérusalem, employant des dizaines d’ouvriers.
La première grève ouvrière de Jérusalem a été celle des typographes, au début du vingtième siècle.
Il va sans dire que Jérusalem avait tous les atouts pour devenir un lieu de prédilection pour la publication de livres et tout particulièrement de livres religieux.
Dans son ouvrage Les premiers livres de Jérusalem, Shoshanah Halevi parle des imprimeries et des différents livres imprimés à Jérusalem. Une profession très estimée était celle de scribe, les sofrei stam, qui recopiaient des rouleaux de Thora, des phylactères et des «mezuzot», qui ornent l’entrée des maisons.
Beaucoup de Juifs de l’Ancien Yishouv gagnaient leur vie comme scribe, et nous avons des témoignages de Yehiel Michel Pines écrivant à des Juifs de la Diaspora et les invitant à acheter leurs rouleaux sacrés chez les scribes de Jérusalem.
Pour répondre à la demande des nombreux touristes, un artisanat de fabrication de souvenirs s’est également développé.
Des ateliers où l’on travaillait le bois d’olivier sont apparus, l’industrie de l’«Art Bezalel» voit le jour. Certains Juifs travaillaient à la broderie ainsi que dans les moulins à farine. Il y a eu une tentative avortée de fonder une usine de tuiles à Motzah, et une autre, plus réussie, de fabrication de carrelage de sols. Malgré tout cela, la population juive de Jérusalem ne s’appuyait pas sur une base économique solide, et l’argent de la halukah continuait à être un facteur de subsistance important.
La crainte constante d’avoir à manquer s’est avérée juste quand la Première Guerre mondiale a éclaté et que les fonds de la halukah ont cessé de parvenir.
Tournons-nous à présent vers la vie culturelle de la communauté juive.
Jérusalem était le centre de l’«Ancien Yishouv» en Eretz-Israël, et le centre de l’étude et de la Thora.
La Vieille Ville était pleine de yeshivot ou écoles talmudiques.
Certaines, comme «Hayyei Olam» ou «Torat Hayyim» ne se sont ouvertes que dans les années 1880. L’émancipation commençait cependant à pénétrer en dépit de l’opposition farouche des extrémistes, qui tenaient à tout prix empêcher son infiltration dans la vie de la ville.
Les extrémistes excommuniaient toute personne ayant des idées libérales et qui tentait d’introduire le moindre changement dans le mode de vie de Jérusalem. C’est ainsi qu’ils ont excommunié le Docteur Ludwig August Frenkel, qui a voulu ouvrir la première école moderne, l’école Lemel, le célèbre historien Heinrich Graetz en visite à Jérusalem, et le Rabbi Azriel Hilde-sheimer.
Cependant, et très lentement, les choses commencent à bouger. C’est par exemple le cas de la Bibliothèque Hébraïque.
Y. A. Frumkin, le propriétaire de ha-Havatzelet, a essayé de créer la première bibliothèque hébraïque en 1875.
Il s’est heurté à une violente opposition, fondée sur l’argument qu’une telle bibliothèque risquait de comporter des ouvrages hérétiques susceptibles de corrompre la jeunesse. Il a donc été obligé de fermer sa bibliothèque.
Mais en 1881, arrive Eliezer Ben-Yehoudah qui décide de s’installer à Jérusalem. Ben-Yehoudah était désireux de développer la vie culturelle de la ville et a d’abord essayé de le faire en co-opérant avec l’Ancien Yishouv, puis en le bravant. Il avait été précédé à Jérusalem par Yehiel Michel Pines, qui a contribué à la construction des nouveaux quartiers et est considéré comme «le père des Biluim». Un groupe d’intellectuels commence à se constituer autour de ces deux personnalités.
En 1880, Ben-Yehoudah ouvre à nouveau la bibliothèque, mais ses débuts sont plutôt cahotiques. Il n’empêche que vers les années 1890, on commence à penser à en ouvrir une seconde. L’organisation Bnei Brith en fonde une, de même que le Bet Midrash Abarbanel. Les livres provenaient de chez le Docteur Yosef Hazanowitz, qui était arrivé en 1890. Ces différentes institutions s’unissent en 1894 pour former ce qui allait devenir le noyau de la Librairie Nationale du campus de l’Université Hébraïque.
Dans les années 1890, il y a eu un débat concernant l’endroit où cette bibliothèque devait se situer. Certains avançaient que sa place devait être à Jaffa, centre du «Nouveau Yishouv». D’autres soutenaient qu’elle devait être dans l’une des colonies. Finalement, la version soutenant que la place de la Bibliothèque Hébraïque était à Jérusalem a fini par l’emporter. L’un des défenseurs les plus acharnés de cette idée était Menahem Ussishkin.
L’adoption de l’hébreu comme langue quotidienne peut également nous servir d’indicateur pour la pénétration de la modernité dans la ville.
Les membres de l’Ancien Yishouv savaient l’hébreu, et ce sont des gens de cette communauté qui ont publié les premiers journaux en hébreu. Mais à mesure que l’usage quotidien de l’hébreu devenait la marque distinctive des membres du Nouveau Yishouv, une réaction contre son utilisation apparaît dans l’Ancien Yishouv, où l’on va de plus en plus lui attribuer le statut de langue sacrée et non de langue quotidienne.
L’hébreu n’était donc pas la langue d’enseignement dans les écoles de Jérusalem, pas même dans les écoles de l’Alliance Israélite Universelle où, pourtant, l’hébreu était une des langues enseignées.
Ce n’est qu’au début du vingtième siècle qu’apparaissent les premiers jardins d’enfants en hébreu, suivis plus tard par d’autres établissements scolaires, parmi lesquels un Gymnasium (lycée) et un Bet-Midrash le-Morim (une école de formation d’enseignants).
Dans ces domaines, Jérusalem est à la traîne: le premier lycée hébraïque, le lycée Herzlyia, s’ouvre en 1906, aux environs de ce qui deviendra Tel-Aviv, alors que le Lycée Hébraïque de Jérusalem ne s’ouvre qu’en 1909. L’assemblée constituante de la Fédération des enseignants ne s’est pas tenue à Jérusalem, mais à Zichron Ya’akov.
Dans ce contexte, il est important de mentionner le rôle tenu par un quartier particulier, Zichron Moshé, qui s’est trouvé être le centre de la vie intellectuelle «émancipée» de Jérusalem.
Dans un des projets envisagés pour la construction d’une ville hébraïque à Jérusalem, il est question de la nécessité de fonder un quartier où l’on ne parlerait que l’hébreu.
David Yellin, l’un des pionniers de l’utilisation de l’hébreu comme langue d’usage quotidien et directeur de l’école de formation d’enseignants, a également été l’un des fondateurs de Zichron Moshé, le quartier qui plus que tout autre symbolise la présence d’intellectuels modernes à Jérusalem.
Les caractéristiques de Jérusalem, en tant que ville orientale et religieuse
Voici comment, en 1867, dans The Innocents Abroad, un livre relatant son voyage en Palestine, le célèbre écrivain Samuel Clemens, connu sous le nom de plume de Mark Twain, parle de Jérusalem:
«Un bon marcheur peut faire le tour des murs de la ville en une heure. Je ne vois pas de meilleur moyen de vous faire comprendre à quel point cette ville est petite. L’aspect de la ville est étrange… Les maisons ont généralement deux étages. Ce sont de solides bâtisses de pierre, recouvertes d’un simple badigeon de chaux ou de plâtre. Une cage grillagée sort en protubérance de chaque fenêtre. Si vous voulez imaginer à quoi ressemble une rue de Jérusalem, vous n’avez qu’à renverser une cage à poulets et la suspendre à chacune des fenêtres des maisons d’une rue américaine.
C’est une ville pauvre, pleine de guenilles et d’immondices, qui témoignent plus clairement de la domination musulmane, que le drapeau frappé du croissant.
Jérusalem est une ville sombre, triste, et sans vie. Je ne voudrais pas y habiter.»
Mark Twain n’est pas le seul à décrire ainsi la ville.
Il y a eu des centaines, sinon des milliers de livres écrits par des visiteurs, qui ont séjourné dans la ville et qui la décrivent comme un endroit rétrograde, loin de tout et très pauvre.
Telle était Jérusalem au début du dix-neuvième siècle.
Mais, sous ce couvert misérable se dissimulaient des valeurs culturelles et spirituelles inestimables.
D’abord et avant tout, Jérusalem est une ville historique, sainte pour trois religions. Elle abrite des vestiges précieux pour le judaïsme et qui remontent à l’époque du Second Temple, comme le Mur des Lamentations et les fondations de la Tour de David. La Jérusalem chrétienne comprend le Saint-Sépulcre, et d’autres sites chrétiens datant en particulier de l’époque des Croisades. Puis, il y a la Jérusalem musulmane, celle du Dôme du Rocher, de la mosquée Al‘Aqsa et d’autres encore.
Certains chercheurs estiment que Jérusalem est une ville orientale ou musulmane, car elle possède les caractéristiques que la classification scientifique énumère pour ce type de ville.
La première de ces caractéristiques est la présence d’une grande mosquée, que l’on appelle aussi «la mosquée du vendredi». C’est là que, tous les vendredis, a lieu une importante prière. Une telle mosquée existe en effet à Jérusalem: c’est la mosquée Al’Aqsa. Viennent ensuite d’autres éléments caractérisant la ville musulmane, comme la résidence du gouverneur et la forteresse.
Or la forteresse de la Tour de David à Jérusalem était le lieu de résidence du gouverneur turc et de sa garnison. Dans une ville musulmane il y a toujours une medrassah, un séminaire religieux comme il s’en trouve plusieurs à Jérusalem.
Le khan, le caravansérail, est également un élément caractéristique. Et la Vieille Ville possède son khan, le khan el-Sultan.
Et il y a enfin le hamam, qui ne remplit pas seulement la fonction d’établissement de bains publics, mais a également une fonction sociale de tout premier ordre, puisque c’est un lieu de rencontre privilégié.
Il y avait plusieurs hamams dans la Vieille Ville au dix-neuvième siècle, Hamam-a-sifa, Hamam-al-Eïn (près du marché de coton), Hamam-al-Sultan (au coin de la Via Dolorosa et la rue Haggaï), Hamam-al-Batrak (dans la rue des chrétiens) et Hamam Mariam (près de la Porte aux Lions).
Un autre élément apparaissant dans presque toutes les villes musulmanes est la citerne-abreuvoir (sabil). Jérusalem possède plusieurs sabils: l’un des plus célèbres est situé en dehors de la ville, près du Bassin du Sultan. Il y en a plusieurs dans la rue Haggaï, dans la Vieille Ville, qui fonctionnaient encore au début du vingtième siècle. Dans la rue de la Chaîne, près de l’entrée du Mont du Temple, se trouve un sabil qui, au moyen d’aqueducs, recueillait les eaux des Bassins de Salomon et alimentait en eau les habitants juifs de la Vieille Ville.
En plus de tous ces éléments, une ville musulmane se caractérise par son habitat et son mode de vie.
La maison arabe orientale s’organise autour d’une cour intérieure. L’extérieur est fermé sauf une seule entrée menant par un long couloir à la cour sur laquelle donnent les différents appartements. C’est bien de cette manière «orientale» que s’organise l’habitat à Jérusalem et à cela s’ajoute la division de la ville en Quartiers – le Quartier juif, le Quartier arménien, le Quartier chrétien, le Quartier des Maghrébins etc. – qui caractérise également la ville orientale.
En plus de tout cela, il y a les marchés (souks), les bazars si caractéristiques de villes comme Istanbul, Le Caire et bien d’autres villes orientales. Et si nous ajoutons les murs avec leurs portes, et le partage fonctionnel entre les différents services, nous pouvons en conclure que la Vieille Ville de Jérusalem comporte un grand nombre d’éléments propres à une ville orientale typique.
Mais toutes ces caractéristiques sont en fait des éléments superficiels. Si nous examinons la situation un peu plus en détail, nous verrons que Jérusalem possède des racines historiques bien plus profondes.
Commençons par la mosquée du vendredi – la Mosquée du Rocher. C’est l’un des lieux les plus sacrés, le troisième en importance, de l’islam. Mais sa sainteté provient de saintetés antérieures, car le Mont du Temple est un lieu saint pour les Juifs depuis les temps les plus anciens. Son emplacement n’est d’ailleurs pas au centre de la ville, comme c’est le cas dans d’autres villes musulmanes, mais dans un endroit déterminé à une époque pré-islamique.
Certaines rues, comme la rue Haggaï, suivent un tracé établi à l’époque du Second Temple et non pendant la période musulmane.
En outre, Jérusalem regorge de centres d’intérêt non musulmans, comme le Saint-Sépulcre des chrétiens.
Nous pouvons donc dire que Jérusalem possède les caractéristiques d’une ville orientale historique à laquelle l’islam a ajouté un nouveau contenu.
Une ville spirituelle
Tous nos cinq sens contribuent à nous faire saisir les caractéristiques d’une ville spirituelle, ou religieuse.
Nous pouvons voir les éléments religieux, les entendre, les sentir, les goûter et les toucher. La Vieille Ville de Jérusalem possède ces caractéristiques.
Commençons par la vue.
En nous promenant dans les ruelles de la Vieille Ville, nous pouvons voir les costumes des différentes sectes religieuses. Il y a les chrétiens dont les moines appartiennent à des ordres divers, les Franciscains, les Grecs orthodoxes, les Arméniens, les Coptes et les Ethiopiens.
Nous voyons les processions le long de la Via Dolorosa, de même que le rassemblement des musulmans tous les vendredis, quand les paysans en vêtements traditionnels se dirigent vers le Mont du Temple.
Le vendredi après-midi, le samedi et les jours de fêtes juives, nous voyons les Juifs de Me’ah Shearim et des autres quartiers dans leurs vêtements traditionnels déambuler dans les rues en direction du Mur des Lamentations où ils remplissent le terre-plein de prières et de chants.
Nous pouvons entendre la Jérusalem religieuse.
Les voix et les sons provenant des cloches des églises et des couvents, se mêlent à l’appel du muezzin dans les mosquées – de nos jours l’appel des croyants à la prière se fait au moyen d’un enregistrement –, ainsi qu’aux voix des Juifs priant dans les synagogues et les yeshivot, tout cela forme un ensemble à nul autre pareil.
De nos jours encore, en marchant dans les ruelles de la Vieille Ville, nous pouvons entendre les voix sortant des yeshivot et des synagogues.
L’odorat est lui aussi concerné.
L’odeur de l’encens, surtout dans les églises grecques orientales et catholiques, frappe les narines du promeneur. Dans les mosquées, que ce soit la Mosquée du Rocher, la mosquée Al‘Aksa ou toute autre mosquée, plane l’odeur très caractéristique des tapis.
Les synagogues et les yeshivot ont également une odeur spécifique – celle des livres de la Thora, des guénizahs, et des autres livres saints qui y sont conservés.
Le goût est également sollicité.
Il est par exemple impossible de manger du porc dans cette ville, car cette viande est interdite chez les Juifs aussi bien que chez les musulmans.
Les chrétiens respectent les sentiments des uns et des autres.
En revanche, les mets traditionnels et typiques abondent. Les bazars de la ville offrent au visiteur des spécialités orientales typiquement musulmanes, et il y a aussi des spécialités juives et chrétiennes.
Dans la Vieille Ville, on peut enfin toucher les pierres du Mur des Lamentations, les pierres et les roches des églises chrétiennes et des mosquées musulmanes. Il n’y a qu’à voir les pèlerins chrétiens caressant la Pierre de l’Onction ou les rochers de Gethsémani. Les Juifs appuient leurs paumes sur les pierres du Mur des Lamentations, et les musulmans vont au Dôme du Rocher, descendent dans le caveau et, la face contre terre, touchent dévotement les pierres saintes.
On peut donc parfaitement sentir l’atmosphère particulière de la Vieille Ville de Jérusalem. Et la meilleure définition qu’on puisse donner à cette ville est celle d’une cité religieuse et spirituelle.
La Nouvelle Jérusalem est très différente. Alors que l’Ancienne Jérusalem existe depuis très longtemps et que le dix-neuvième siècle n’est qu’une étape de plus dans sa longue histoire, la Nouvelle ne commence à se créer qu’au dix-neuvième siècle.
Auparavant, il n’y avait rien en dehors des murs.
La Vieille Ville est une agglomération rétrograde, pré-moderne, alors que la Nouvelle est une métropole moderne, en plein essor et qui ne cesse de se développer.
A plusieurs reprises, nous trouvons au dix-neuvième siècle des comparaisons entre la Vieille Ville avec ses ruelles étroites, et la Ville Nouvelle qui offre de belles avenues et des conditions de vie autrement plus confortables à ses habitants.
La Vieille Ville peut offrir d’importants centres religieux, comme le Mur des Lamentations, la mosquée Al’Aqsa, le Dôme du Rocher et le Saint-Sépulcre. La Ville Nouvelle n’a rien de tout cela.
Cependant, elle a ceci de particulier qu’elle s’est développée conformément à une division communautaire entre les trois religions importantes.
Au fur et à mesure que la ville se développait, un regroupement musulman s’est formé au nord, un regroupement chrétien au sud et un vaste regroupement juif à l’ouest.
La Nouvelle Jérusalem est constituée de quartiers et jusqu’à présent, les habitants précisent souvent de préférence le quartier que la rue qu’ils habitent.
La Nouvelle Ville est donc un ensemble de quartiers ayant chacun un caractère spécifique, souvent communautaire, par opposition à la Vieille Ville, qui est religieuse et spirituelle.
Nous avons donc examiné la différence entre l’Ancienne Jérusalem et la Nouvelle.
En conclusion nous pourrons dire que deux processus ont lieu au cours du dix-neuvième siècle.
Dans un premier temps, les trois religions ont construit des bâtiments importants et imposants dans la Vieille Ville, la remplissant entièrement.
Dans un deuxième temps, les habitants, qui s’y sont trouvés à l’étroit, sont sortis de la ville et ont commencé à construire hors des murs. Ce n’est pas le fait d’un agent extérieur.
Les Juifs qui sont d’abord venus s’installer dans la Vieille Ville et l’ont remplie, en sont sortis pour construire la Nouvelle. Les pèlerins chrétiens qui étaient auparavant hébergés dans la Vieille Ville, ont également contribué à sa construction. Il en va de même pour les familles musulmanes qui vivaient auparavant dans la Vieille Ville et ont bâti des résidences hors des murs.
C’est donc la construction de la Ville Nouvelle qui explique l’abandon de l’Ancienne.
A mesure que les quartiers hors des murs s’élevaient, nombreux étaient les Juifs qui quittaient la Vieille Ville pour la Nouvelle.
Au moment de la Guerre d’Indépendance, en 1948, il ne restait que 1.500 à 2.000 Juifs dans la Vieille Ville et l’on peut expliquer une certaine déchéance de la Vieille Ville par le fait que les Juifs l’avaient progressivement quittée depuis le début du siècle.
Le recensement fait au cours de la Première Guerre mondiale nous indique que 16.000 Juifs seulement résidaient dans la Vieille Ville, alors que la Nouvelle en comptait 29.000.
Pendant les émeutes de 1921 à 1929, les Juifs abandonnent le Quartier musulman et se retranchent autour de ce qui avait été le premier noyau du Quartier juif, autour des synagogues sépharades, la Synagogue Khurvah, la Ramban, etc.
Mais personne ne se rendait évidemment compte que la construction de la Ville Nouvelle risquait d’aboutir à l’abandon de la Vieille Ville.
Au début de cette étude, nous avons souligné que Jérusalem était une petite ville de 9.000 habitants aux confins de l’Empire ottoman.
Il est un fait très significatif qui vient illustrer notre propos.
Napoléon a conquis Eretz-Israël en 1799 et y a séjourné cinq mois. Il a résidé à Ramleh, mais n’a pas pris la peine de faire le détour pour aller visiter Jérusalem qui, située à l’écart des voies de communication, ne présentait aucun intérêt, ni la moindre importance et ne pouvait rivaliser avec Acco et Gaza.
Au cours du dix-neuvième siècle, le statut de la ville change du tout au tout.
Elle devient la ville la plus importante d’Eretz-Israël, et sa population passe de 9.000 à 70.000 habitants. Pendant la même période, la population d’Acco n’a presque pas bougé. Le nombre de ses habitants a même diminué un peu. Gaza passe de 10.000 à 20.000 habitants. Mais Jérusalem ne cesse de se développer.
Si Jaffa grandit aussi et devient la deuxième ville du pays, c’est essentiellement parce que, jusqu’aux années 1880 et 1890, elle est le port par lequel on arrive à Jérusalem.
Par la suite seulement, elle se développera d’une manière indépendante.
Le facteur essentiel expliquant l’accroissement de Jérusalem est le facteur juif.
C’est incontestablement la raison la plus importante et les chiffres de la population en témoignent.
Au début du dix-neuvième siècle, la population juive de Jérusalem atteignait à peine 2.000 personnes. A la veille de la Première Guerre mondiale, en revanche, Jérusalem compte 45.000 Juifs sur une population totale de 70.000 âmes.
Les Juifs sont alors la partie la plus dynamique et la plus active de la ville.
Indications Bibliographiques
- Avitsour, Sh. La vie quotidienne en Eretz-Israël au XIXe siècle, (en hébreu) 1976-1977.
- Ben-Arieh, Y., The Rediscovery of the Holy Land in the Nineteenth Century, Magnes Press and Israel Exploration society, Jérusalem, 1979.
- Ben-Arieh, Y., Jerusalem in the Nineteenth Century. The Old City, Yad Ben-Zvi, Jerusalem and St Martin Press, New York, 1984.
- Ben-Arieh, Y., Jerusalem in the Nineteenth Century. The Emergence of the New City, Yad Ben-Zvi, Jerusalem and St Martin Press, New York, 1986.
- Ben-Arieh, Y., Painting Palestine in the Nineteenth Century, Yad Ben-Zvi, Yedioth Aharonoth, Chemed Books, 1986.
- Eliav, M. Le peuplement d’Eretz-Israël au XIXe siècle, Jérusalem, (en hébreu) 1979-1980.
- Ben-Zvi, Y., Eretz-Israël et son peuplement sous l’empire ottoman (en hébreu), Jérusalem, 1955.
- Wallach, Y., Atlas pour l’histoire d’Eretz-Israël depuis le début du peuplement jusqu’à a création de l’Etat, (en hébreu) Jérusalem 1972.
Géographie d’une renaissance par Yehoshua Ben-Arieh – Traduit de l’hébreu par Francine Lévy
FIN
Voir le dossier complet Jérusalem au XIXe siècle
Partagé par Terre Promise ©
Bonjour à tous. Vous pouvez assurer la continuité de ce site de plusieurs manières : En partageant les articles que vous avez aimé, sur vos réseaux sociaux. En faisant un don sécurisé sur Paypal.
Même 1€ est important ! |