Le judaïsme dans la Manche
Le judaïsme est l’une des grandes religions monothéistes. S’il n’y a pas à proprement parler de communauté juive aujourd’hui dans la Manche, les Juifs ne sont pas absents de l’histoire et du territoire départemental.
Histoire
Présents en Gaule depuis la conquête romaine, les Juifs sont expulsés de France par l’édit royal du 10 mars 1182, signé par Philippe Auguste, qui l’annule en 1198. Philippe le Bel fait de même entre 1306 et 1315.
La Normandie serait au Moyen Âge la province française accueillant le plus de Juifs, et Guillaume le Conquérant favorise leur installation à Londres après 1066. Rouen est un important centre du judaïsme à partir du XIe siècle, si Caen possède une synagogue jusqu’en 1306. Le relevé toponymique de Rémy Villand semble prouver la présence des Juifs sur l’ensemble du territoire de la Manche au XIIe siècle.
Exclus des activités agricoles et artisanales, ils se spécialisent dans l’usure et le prêt.
L’ouvrage Les familles juives en France XVIe siècle-1815, indique qu’aucun juif n’a été recensé dans la Manche ni en Basse-Normandie suite au décret de Bayonne du 28 juillet 1808.
À l’époque de l’Affaire Dreyfus, la Manche n’est pas épargnée par l’antisémitisme. La Croix de la Manche écrit le 15 juin 1898 que « si l’on n’interdit pas aux commerçant israélites de s’installer à Cherbourg, on sera obligé de porter des vêtements qui sentent la race fétide de Judas ».
Au début du XXe siècle, Cherbourg est un port important d’émigration vers les États-Unis pour les Juifs de l’Europe de l’Est, une synagogue provisoire étant créée dans l’hôtel Atlantique pour eux. Jonas Lévy siège au conseil municipal de Cherbourg sous l’étiquette radical-socialiste de 1908 à 1929.
À l’aube de la Seconde Guerre mondiale, on évalue entre 150 et 200 le nombre de Juifs dans la Manche. Sur les 130 répertoriés, les deux tiers vivent à Cherbourg, et cinq foyers sont à Avranches, dont les Mainemer, marchands ambulants en bonneterie originaires de Pologne, installés en 1932, et Zalma et Ruchla Rozenthal, qui exercent le même métier, et viennent du même pays.
En 1943, de juin à octobre, la caserne Dixmude à Querqueville est utilisée par les Allemands comme « camp d’israélites » pour des prisonniers en attente de transfert vers Aurigny.
Professeur d’histoire-géographie au collège Gambetta à Carentan-les-Marais, Olivier Jouault mène des recherches avec ses élèves de 4e et 3e sur les Juifs manchois victimes de la Shoah. Sur les 125 Israélites recensés en 1940, 86 auraient été victimes de la répression nazie : 82 morts en déportation, principalement à Auschwitz, et 4 fusillés ou décédés au camp de Drancy.
Le 19 février 2019, trois rassemblements ont lieu à Cherbourg-en-Cotentin, Coutances (450 personnes) et Les Pieux en réponse à l’appel national lancé pour soutenir la communauté juive après la recrudescence des actes antisémites constatée en France ces derniers mois.
Le 4 octobre 2020, à Cherbourg-en-Cotentin, inauguration du Mémorial de la Shoah et des Justes parmi les Nations manchois, place de la République, à côté du Mémorial des martyrs de la Résistance.
Liste des Justes dans la Manche
Liste des Justes parmi les nations
Vingt-cinq Manchois ont été faits « Justes parmi les nations », pour avoir sauvé des Juifs pendant l’occupation nazie de la Seconde Guerre mondiale.
Le comité français pour Yad Vashem permet d’en recenser trente-deux en 2016, trente-six en 2020.
- par ordre alpabétique des patronymes
- Henri et Madeleine Bitard, Avranches, 16 juin 2013 ;
- Angèle et Marcel Bodin, Saint-Hilaire-du-Harcouët, 3 mai 2009 ;
- Gérard et Louise Bouquey, Barenton, 3 juillet 1992 ;
- Lucienne Chaumont, Saint-Hilaire-du-Harcouët / Parigny, 3 mai 2011 ;
- Bernard et Guy Gérard, La Trinité, 28 octobre 2007 ;
- Pierre-Marie Gerlier, archevêque de Lyon, attaché à Saint-Lô où il a été élevé, a également reçu à titre posthume la médaille des Justes parmi les nations le 15 juillet 1980 ;
- Louis Gosselin, Cherbourg-Octeville, 7 septembre 1971 ;
- Angélina et Ferdinand Huault, Carantilly, 19 avril 1998 ;
- Germaine et Simonne Jamard, Paris, 30 mars 2009 ;
- Maxime Leluan, Cherbourg-Octeville, 25 juillet 1993 ;
- Marthe et Pierre Lebrun, Notre-Dame-de-Cenilly, 30 mars 2009 ;
- Andrée et Maurice Lemarchands, Villedieu-les-Poêles, 29 avril 1989 ;
- Renée et Ernest Lepileur et leur fille Denise Lepileur Levallois, Saint-Lô, 6 mai 1996 ;
- Suzanne Lerouxel, Gratot, 19 avril 1998 ;
- Henri Ménardais, ancien curé de Genêts, reçoit le titre en 1998 à titre posthume ;
- André et Clémentine Mesnage, Gathemo, 29 décembre 2015 ;
- Angèle et François Parigny, Saint-Hilaire-du-Harcouët, 23 juin 2015 ;
- Marie-Louise Parry née Laisne, La Trinité, 28 octobre 2007 ;
- Ferrucio et Suzanne Pedrelli, Gathemo, 29 décembre 2015 ;
- Marie-Thérèse et Armand Piel, Saint-Hilaire-du-Harcouët, 3 mai 2009 ;
- Roland et Jeanne Ricordeau, Berjou, 14 septembre 2010, retirés à Omonville-la-Rogue, reçoivent ce titre le 18 septembre 2011 à titre posthume ;
- Élise et Paul Thomas, Saint-Loup, 29 janvier 1992 .
Douze communes de la Manche sont concernées par ces actions : Barenton, Carantilly, Cherbourg-Octeville (2 actions),Gathemo (2), Gratot, La Trinité (2), Notre-Dame-de-Cenilly, Parigny, Saint-Hilaire-du-Harcouët (4), Saint-Lô, Saint-Loup et Villedieu-les-Poêles.
Présence juive attestée
De nombreux odonymes (types rue aux Juifs, rue des Juifs), parfois fixés en tant que microtoponymes (types la Rue aux Juifs, la Rue des Juifs), traductions du terme vicus judæorum par lequel les Romains désignaient les quartiers juifs, attestent de la présence ancienne de communautés juives dans la Manche. Un autre fréquent toponyme est le type la Judée, relevé quatre fois dans ce département.
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Noms médiévaux
- Rue aux Juifs, ancienne rue, à Avranches
- Rue aux Juifs, à Bricquebec
- Rue aux Juifs, à Cametours
- Rue des Juifs, à Cerisy-la-Salle
- Rue des Juifs, à Granville
- Rue aux Juifs, ancienne rue, à Lessay
- Rue des Juifs, à Montebourg
- Rue aux Juifs, à Montmartin-sur-Mer
- Rue aux Juifs, ancienne rue, à Picauville
- Rue aux Juifs, ancienne rue, à Pierreville
- Rue des Juifs, à Pont-Hébert
- Rue des Juifs, à Remilly-sur-Lozon
- Rue aux Juifs à Saint-Aubin-du-Perron
- Rue aux Juifs, ancienne rue, à Saint-Pierre-Église
- Rue aux Juifs, ancienne rue, à Tourlaville
- Rue aux Juifs, à Valognes
- Rue des Juifs, à Villiers-Fossard
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Noms modernes
- Rue de la Synagogue, à Valognes, d’après le quartier de la Synagogue, délimité par les carrefours du Gibet et de la Croix-Morville
- Place des Justes, à Cherbourg-Octeville
Microtoponymes
- La Rue des Juifs, ferme, à Crasville
- La Rue aux Juifs, hameau, à La Glacerie
- La Rue aux Juifs, hameau, à Saint-Martin-d’Aubigny
- La Rue des Juifs, hameau, au Vrétot
- La Judée, hameau, à Équeurdreville-Hainneville et Nouainville
- La Judée, hameau, à Fermanville
- La Judée, hameau, à Cérences
- La Croix de Judée, carrefour, à Saint-Georges-d’Elle
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